jeudi 12 mai 2022

Abstraction lyrique : l'art du sentiment

L'abstraction lyrique est un mouvement pictural basé sur l'expression direct des émotions par l'intermédiaire des outils de création plastique, la peinture en particulier.

(Lyrique : 1.Qui exprime des sentiments intimes au moyen de rythmes et d'images propres à communiquer au lecteur l'émotion du poète. - 2. Plein d'un enthousiasme, d'une exaltation de poète. Dictionnaire Le Robert)

Composition VIII, W. Kandinsky, 1923
Le mouvement se fonde sur les travaux et théories de W. Kandinsky : Dans son ouvrage rédigé en 1911, Du Spirituel dans l’art,
il définit trois types de peinture,
les « impressions », les « improvisations »
et les « compositions ».

Tandis que les impressions s’appuient sur une réalité extérieure qui leur sert de point de départ, les improvisations et les compositions dépeignent des images surgies de l’inconscient, la « composition » étant plus élaborée d’un point de vue formel.


Il développe ses théories en tant qu'enseignant à l'école du Bauhaus (1922-1932), ainsi que dans plusieurs ouvrages :
Il explique la vibration des couleurs dans "Du spirituel dans l'art", en 1911
Et l'équilibre du point et de la ligne dans "Point et ligne sur plan", en 1926...
Dès 1933, les Etats-Unis accueillent de nombreux artistes qui fuyent l’allemagne nazis.
D’autres suivent et la scène artistique se développe largement à New York, comme en californie :


En 1936 les artistes américains abstraits s'organisent en une assocation de promotion AAA acronyme de American Abstract Artists. Ils publient manifestes et articles et réclament l'ouverture des musées américains aux artistes abstraits américains.


L'expressionnisme abstrait apparaît en 1948, au cours d'une exposition à New York,
financée par des fonds publics.
Il se caractérise par  :

  • Des toiles immenses, parfois entièrement peintes (all-over). 
  • Chaque coup de pinceau annule le précédent et le rapport de celui-ci avec la surface du fond. 
  • Il met en valeur la matière et la couleur utilisée comme matière.

On peut diviser l'expressionnisme abstrait en deux branches principales distinctes : le colorfield painting et l'action painting. La distinction n'est pas toujours évidente, certains se revendiquant des deux tendances, comme Sam Francis. (voir l'expressionnisme abstrait en 3 points)

Around the blue, Sam Francis, 1957


Le colorfield painting s'attache uniquement à la couleur et non au mouvement.




White center, Marc Rothko, 1950

Marc Rothko (1903-1970) en est l'initiateur avec ses toiles où sont disposés des aplats de couleur très riches et lumineux. Ces plages sont appliquées selon la technique du glacis, une couche de peinture à l'huile presque transparente, qu'il faut superposer de nombreuses fois pour obtenir une teinte plus ou moins intense.

Ce sont les harmonies colorés et les contrastes qui apporte sa dimension psychique à l'œuvre.

D'autres peintres américain comme Barnett Newman ou Franck Stella pratiqueront également le colorfield painting.
(retrospective)








L'action painting, comme son nom l'indique, se caractérise par l'action que le peintre met dans son pinceau avec lequel il projette violemment la peinture sur la toile.
Les gestes sont rapides, instinctifs, et spontanés.

Le plus illustre acteur de ce mouvement est Jackson Pollock (1912-1956) : il abandonne le motif et passe par les méthodes d’écoulement, de déversement et de projection de la peinture sur la toile (Dripping/pouring).
Incomprise au début, sa peinture est vivement critiquée. Mais il est soutenu par des collectionneurs tels que Peggy Guggenheim.

Il développe ensuite les all-over : il répartie sur la totalité de la surface de la toile une couche de matière plus ou moins dense.
Son travail est légitimé par les nombreuses vidéos et photo prise dans son atelier : exemple là
En 2000 Ed Harris réalise le film "Pollock" qui retrace sa carrière. La bande annonce ici.


En France de nombreux artistes contribuent à l'abstraction.

Nicolas de Staël (1913-1955), il prétexte le thème du paysage pour y développer des aplats colorés avec d'importante densité de matière. Amoureux de la lumière du midi, il peint de nombreuses toiles entre Toulon, Le Lavandou, Cannes, Antibes et Nice.
Fort carré, N. De Stael, 1955


Georges Mathieu (1921-2012), il revendique l'action-painting et travaille le geste entre sa dimension plastique et calligraphique. Ses compositions nerveuses évoquent des lignes, des nœuds, des signatures...Il participe à de nombreux projets, réalise toute une série d’affiches pour Air-France, et de médailles pour la Monnaie de Paris, il crée une nouvelle pièce de 10 francs.













Pierre Soulages (né en 1919), est connu pour l'utilisation intensive du noir dans son travail. Au delà de la couleur, il s'intéresse à le matérialité et la luminosité de la peinture.
Il travaille avec des pinceaux larges de peintre en bâtiment, détourne des outils de leur fonction première et en fabrique de nouveaux. Il peint à même le sol, ajoute, enlève de la matière. Il contrôle son geste, cherche les rapports les plus justes entre l’obscur et le clair.
Son explication en vidéo

Diptyque, P. Soulages, 1979

Malgré son succès auprès des galeries, des musées et institutions, l’expressionisme abstrait ne fait pas l’unanimité. Certains lui reprochent sont manque d’attache à la réalité, au quotidien, qui le rend peu accessible au grand public, d’autres au contraire voit dans l’abstraction lyrique un sentimentalisme mièvre, dénué de message ou de concept.

Art minimal :

Donald Judd réalise à partir de 1965, des œuvres fixées aux murs constituées de plusieurs éléments, appelées « Stack » (pile). Les différents éléments sont placés à intervalles réguliers. Le premier élément, en partant du bas, est volontairement fixé non pas sur le sol mais légèrement au-dessus. 
Dan Flavin utilise beaucoup de néons de couleurs différentes. Il joue sur les variations de perception (du regard) en plaçant, par exemple, son œuvre Untitled (To Donna 5a) dans l’angle d’une pièce, les lumières accentuent les structures de l’architecture.


Arte povera : 
Le terme Arte povera est utilisé pour la première fois en 1967 par Germano Celant, critique d’art italien qui emprunte l’adjectif "pauvre" au vocabulaire du théâtre expérimental de Grotowski.

Dans ce contexte, la pauvreté doit être comprise comme "un dépouillement volontaire des acquis de la culture" pour atteindre à la vérité originelle du corps et de ses perceptions.

Les artistes utilisent des matériaux pauvres, périssables, privilégient l’installation, créant des œuvres éphémères qui échappent à l’industrie culturelle de l’époque, vis-à-vis de laquelle ils assurent ainsi leur indépendance.

Les acteurs de Arte Povera, refusant de se laisser enfermer dans une définition, rejettent la qualification de mouvement, pour lui préférer celle d’attitude. 
Il s’opposent à la société de consommation, et préfère la nature qui offre les bases (pauvres et humbles) de leurs créations.

Le Land Art : 
Le land art est une tendance de l'art contemporain utilisant le cadre et les matériaux de la nature (bois, terre, pierres, sable, eau, rocher, etc.). Le plus souvent, les œuvres sont en extérieur, exposées aux éléments et soumises à l'érosion naturelle ; ainsi, certaines œuvres ont disparu et il ne reste que leur souvenir photographique et des vidéos.
Les premières œuvres ont été réalisées dans les paysages désertiques de l'Ouest américain à la fin des années 1960. (Wikipédia)


Le couple français Christo et Jeanne-Claude fait partie des land artistes les plus réputés. Ils se sont rendus célèbres, entre autre, par leurs emballages démesurés (Le pont neuf - 1985, Le Reichtag -1995, et l’Arc de Triomphe - 2021, mise en œuvre par ses héritiers.)