mardi 23 mai 2023

ART ABSTRAIT : vers de nouvelles formes artistiques.

Qu'est ce que l'art abstrait :
On parle d'abstraction dès lors que l'oeuvre ne représente rien de particulier, ni paysage, ni personnage, ni objet ni aucun autre élément identifiable. L'art abstrait cherche simplement à susciter une émotion par l'agencement des formes, des couleurs et autres constituants plastiques de l'œuvre.

C'est au début du XXe siècle que se développe l'abstraction, par les recherches simultanées
de V. Kandinsky ; K. Malévitch ; S & R. Delaunay.
Ces artistes s'intéressent :
  • aux contrastes simultanés des couleurs;
  • au rythme;
  • au jeu et à l'articulation des formes dans l'espace;
  • au déploiement des lignes sur la toile.
L'explication vidéo ici


On distingue deux grands registres de l'abstraction : 
  • Abstraction géométrique
    • Suprématisme (à partir de 1917)
    • De Stijl (1917-1932)
    • Néo-plasticisme (1917-1939)
    • Art cinétique (à partir de 1955)
    • Art optique (à partir de 1962)
    • Art numérique (à partir de 1970)
  • Abstraction lyrique.
    • Du spirituel dans l'art (1910)
    • Expressionisme abstrait (à partir de 1945) : Action painting / Colorfield Painting
    • Monochrome et outre noir (à partir de 1979)

C. Malevitch, carré blanc sur fond blanc, 1918

L’abstraction géometrique est une forme d’art non figurative, qui structure lignes formes et couleurs sur l’espace de la toile.

Initiée par Malévitch et le Suprématisme, l’abstraction géométrique cherche par la forme un moyen d’expression pure.
Comme l’indique Malévitch, dans son développement historique, le suprématisme a connu “trois degrés (périodes) : le noir, la couleur et le blanc”

Il faut donc voir le blanc (celui du fond) comme cette espèce d’ “espace infini” très proche d’un espace electro-magnétique dans lequel des objets gravitationnels se situeraient dans une sorte d’équilibre des forces. Le noir étant cette force qui découvre la “forme de l’action” dans son sens le plus pur, et la couleur, ses variantes.










Dans les années 10, P. Mondrian s'installe à Paris et s’inspire du cubisme, 
il traite d'abord le sujet de l'arbre, qui le mène peu à peu à l'abstraction.



Composition n°2, 1937
Il élabore ensuite un système de grille orthogonale, une alternance de surface vide et surface pleine c'est le Néo-plasticisme : ces toiles sont structurées par les lignes noires et les couleurs primaires qui définissent l’espace, créent contraste et rythme.
Associé à Théo Van Doesburg, il créer la revue et le mouvement "De Stjil", qui propose l'application de ces théories à l'architecture et aux arts appliqués (à découvrir en vidéo).

Durant la seconde guerre mondiale, il s’installe à New York ou il terminera sa vie.
Il abandonne alors les lignes noires pour des lignes formées de petits rectangles colorés et perpendiculaires. Broadway Boogie-Woogie est l’une de ses dernières œuvres...



P. Mondrian, Broadway Boogie-Woogie, 1943

Après la seconde guerre mondiale l’abstraction géométrique introduit d’autres mouvement tel que :


- l’art cinétique : l’oeuvre est conditionnée par l’action d’un mouvement, naturel, spontané ou même mécanique, comme les mobiles d'Alexander Calder.
voir ici Red, blue and Black Cascade (mobile, 1974) en vidéo



- L’art optique : Les formes géométriques, les contrastes forts et les couleurs saturées sont organisées de manière à produire une illusion d’optique : Un effet de mouvement, ou de profondeur créer par la persistance rétinienne.
V. Vasarely, VEGA, 1956

Victor Vasarely en est l'un des principaux représentant : il théorise ces principes optiques dans "le mannifeste jaune en 1955"

Ce courant, dévoilé lors de l'exposition "Responsive Eye" (l'oeil réceptif), au MOMA en 1965 (vidéo ici) et à l’effet extra-ordinaire connaîtra une forte adhésion du public américain, puis un succès identique en Europe comme en témoigne cette archive INA

Fort de ces principes, Victor Vasarely produit de nombreux visuels pour la publicité, et autres supports de communication. En 1972, il dessine avec son fils l'emblématique logo de la marque française Renault.

En 1976, on crée la fondation Vasarely à Aix-en-Provence. Un lieu d'exposition qu'il veut ouvert sur le monde et accessible à tout les publics, privilégiant l'exploration pédagogique.


Aujourd'hui encore, de nombreux plasticiens continuent à développer le registre de l'art optique et plus généralement de l'abstraction géométrique, particulièrement aidés par les calculs automatisés et le numérique. Par exemple : François Morellet, Arièle Rozowy ou encore Gottfried Honegger.


L'art numérique :

Dès 1960, les participants de l'art optique commencent à utiliser des procédés mathématiques (algorythmes), et mécaniques (machines) pour la création de leurs œuvres. Plus tard, dans les années 1970, des artistes et des informaticiens se sont associés pour créer des œuvres d’art générées par ordinateur. Toutefois, ce n’est que dans les années 1980 que le terme « art numérique » a été utilisé pour la première fois, alors que le médium s’imposait dans le monde de l’art. Sa popularité croissante s’est poursuivie dans les années 1990, avec la naissance du World Wide Web. Aujourd'hui les artistes continuent d'explorer les multiples possibilité de ce médium, en s'appuyant sur l'interactivité et la réalité virtuelle. Avec l’arrivée du  et le boom des NFT*, on peut affirmer que le médium a laissé une empreinte considérable sur le monde de l’art.

*NFT signifie en anglais "non-fungible token", qui veut dire en français "jeton non fongible" et désigne un titre numérique d'authenticité d'un objet immatériel. C'est ainsi un titre de propriété consigné par un registre numérique.


L'abstraction lyrique est un mouvement pictural basé sur l'expression direct des émotions par l'intermédiaire des outils de création plastique, la peinture en particulier.

Composition VIII, W. Kandinsky, 1923
Le mouvement se fonde sur les travaux et théories de W. Kandinsky : Dans son ouvrage rédigé en 1911, Du Spirituel dans l’art,
il définit trois types de peinture,
les « impressions », les « improvisations »
et les « compositions ».

Tandis que les impressions s’appuient sur une réalité extérieure qui leur sert de point de départ, les improvisations et les compositions dépeignent des images surgies de l’inconscient, la « composition » étant plus élaborée d’un point de vue formel.


Il développe ses théories en tant qu'enseignant à l'école du Bauhaus (1922-1932), ainsi que dans plusieurs ouvrages :
Il explique la vibration des couleurs dans "Du spirituel dans l'art", en 1911
Et l'équilibre du point et de la ligne dans "Point et ligne sur plan", en 1926...


Dès 1933, les Etats-Unis accueillent de nombreux artistes qui fuyent l’allemagne nazis.
D’autres suivent et la scène artistique se développe largement à New York, comme en californie :


En 1936 les artistes américains abstraits s'organisent en une assocation de promotion AAA acronyme de American Abstract Artists. Ils publient manifestes et articles et réclament l'ouverture des musées américains aux artistes abstraits américains.


L'expressionnisme abstrait apparaît en 1948, au cours d'une exposition à New York,
financée par des fonds publics.
Il se caractérise par  :

  • Des toiles immenses, parfois entièrement peintes (all-over). 
  • Chaque coup de pinceau annule le précédent et le rapport de celui-ci avec la surface du fond. 
  • Il met en valeur la matière et la couleur utilisée comme matière.

On peut diviser l'expressionnisme abstrait en deux branches principales distinctes : l'action painting et le colorfield painting. (voir l'expressionnisme abstrait en 3 points)

L'action painting, comme son nom l'indique, se caractérise par l'action que le peintre met dans son pinceau avec lequel il projette violemment la peinture sur la toile.
Les gestes sont rapides, instinctifs, et spontanés.

Le plus illustre acteur de ce mouvement est Jackson Pollock (1912-1956) : il abandonne le motif et passe par les méthodes d’écoulement, de déversement et de projection de la peinture sur la toile (Dripping/pouring).
Incomprise au début, sa peinture est vivement critiquée. Mais il est soutenu par des collectionneurs tels que Peggy Guggenheim.

Il développe ensuite les all-over : il répartie sur la totalité de la surface de la toile une couche de matière plus ou moins dense.
Son travail est légitimé par les nombreuses vidéos et photo prise dans son atelier : exemple là
En 2000 Ed Harris réalise le film "Pollock" qui retrace sa carrière. La bande annonce ici.


White center, Marc Rothko, 1950
Le colorfield painting s'attache uniquement à la couleur et non au mouvement.
Marc Rothko (1903-1970) en est l'initiateur avec ses toiles où sont disposés des aplats de couleur très riches et lumineux. Ces plages sont appliquées selon la technique du glacis, une couche de peinture à l'huile presque transparente, qu'il faut superposer de nombreuses fois pour obtenir une teinte plus ou moins intense.

Ce sont les harmonies colorés et les contrastes qui apporte sa dimension psychique à l'œuvre.

D'autres peintres américain comme Barnett Newman ou Franck Stella pratiqueront également le colorfield painting.
(retrospective)





En France de nombreux artistes contribuent à l'abstraction.

Nicolas de Staël (1913-1955), il prétexte le thème du paysage pour y développer des aplats colorés avec d'importante densité de matière. Amoureux de la lumière du midi, il peint de nombreuses toiles entre Toulon, Le Lavandou, Cannes, Antibes et Nice. (Voir Nicolas De Staël en 5 œuvres)
Fort carré, N. De Stael, 1955


Georges Mathieu (1921-2012), il revendique l'action-painting et travaille le geste entre sa dimension plastique et calligraphique. Ses compositions nerveuses évoquent des lignes, des nœuds, des signatures...Il participe à de nombreux projets, réalise toute une série d’affiches pour Air-France, et de médailles pour la Monnaie de Paris, il crée une nouvelle pièce de 10 francs. Voir le site officiel.













Pierre Soulages (né en 1919), est connu pour l'utilisation intensive du noir dans son travail. Au delà de la couleur, il s'intéresse à le matérialité et la luminosité de la peinture.
Il travaille avec des pinceaux larges de peintre en bâtiment, détourne des outils de leur fonction première et en fabrique de nouveaux. Il peint à même le sol, ajoute, enlève de la matière. Il contrôle son geste, cherche les rapports les plus justes entre l’obscur et le clair.
Son explication en vidéo

Diptyque, P. Soulages, 1979